- Interview du graffeur Sevyce.
- Détails
- Catégorie parente: Entrée des artistes
- Catégorie : - Sevyce
- Publié le 5 novembre 2009
Interview de Sevyce, graffeur.
Bonjour Sevyce, merci de me recevoir, vous êtes né à Caen en 1984 et vous résidez depuis quinze ans au Havre, en quelle année avez vous commencé à graffer ? Comment devient-on gaffeur ? Qu’est ce qui vous a poussé à prendre une bombe ? C’est tout simple, en cours d’Allemand j’étais à côté d’un gars qui posait à l’époque sous le nom de Zone, je le voyais faire ses sketchs (ses croquis) sur des feuilles de papier que je trouvais super, c’est lui qui m’a expliqué le truc et tout d’abord trouver son pseudo. Il vous arrive aussi d’utiliser un autre pseudo. « Stane » quelle en est la raison ? J’ai essayé d’autres pseudos car on m’a très vite fait comprendre que DJ Doberman ne faisait pas crédible, j’ai alors cherché un blaze jusqu’à ce fameux jour en classe d’éco. J’avais le morceau Stan de Eminen qui me trottait dans la tête et je me suis aperçu que ma voisine d'en face avait des Stan Smith aux pieds, ça a été un déclic et je l’ai adopté. J’ai commencé à poser Stane pendant trois, quatre ans avant de m’apercevoir que ce pseudo était pas mal utilisé et qu’il fallait mieux trouver un nom qui sorte du lot. Et pourquoi avoir choisi précisément cette forme d’expression ? Je m’étais mis à faire du sketch et comme le graff me plaisait bien j’ai voulu entrer dans un crew, le Nep m’a donné comme « condition de passage » de faire un sketch qui plaise à tout le monde, j’ai donc fait un Nep’crew qui est apparemment bien passé. Il existe de nombreux styles de graffs, dans quel genre vous exprimez vous ? Le Wild Style. Au début tu tâtonnes, tu regardes ce que font les autres sur le terrain, regardes des vidéos, lit des magasines et tu te fais ton idée.
Le Wild Style est un lettrage compliqué en 2D, en général la base est ; remplissage clair et perspective foncée avec une out-line et un fond. Plus ça va plus je kiffe ce style, la technique aidant je m’essaye à des trucs de plus en plus compliqués, je les teste parfois sur papier avant mais l'improvisation est plus souvent de mise. Certains de vos personnages font très DC Comics, vous êtes fan de super héros ? On est plusieurs dans le crew à aimer les super héros, je trouve que se sont des personnages qui vont bien avec mon style, j’aime aussi l’illustration Japonaise et je m’en suis inspiré pour certaines de mes réalisations. Je fais aussi du paysage, en fait j'essaye de me diversifier et de toucher à tout, mais j'ai du mal à ne faire que du lettrage ou que du perso, j'aime bien allier l'un avec l'autre, mais le temps limite les possibilités et si tu veux taper du fond, du perso et du lettrage il te faut compter en jours et non plus en heures ! Faites vous parti d’un crew ? Qu’est ce que cela vous apporte ? Tu n’as pas forcément besoin d’un crew pour peindre à plusieurs, il suffit tout simplement d’être bien ensemble. Mais en ce qui me concerne, j'ai plusieurs crews, il y a celui d’origine, celui de dix piges, les NEP’S à qui je suis et serais toujours attaché, il m’a donné beaucoup tout comme je lui ai beaucoup donné. Cela ne vous fend pas le cœur de savoir que vos œuvres sont éphémères ? Cela fait partie du délire, on le sait, même si tu as passé des heures sur ta fresque elle va vite se retrouver recouverte. Il y en a qui exagèrent, c’est la petite guéguerre, tu me toyes, je te repasse.La plupart des embrouilles entre graffeurs viennent de là. Graffez vous toujours au Havre ou exportez vous votre talent dans d’autres villes ? Plus il y en a mieux c’est, en vrac je peux citer : le Havre, Rouen, Caen, Amiens, Rennes, Bordeaux, Toulouse, Béziers, Lyon, Grenoble, Lille, Tours, en Belgique, Allemagne, Espagne... En fait j'essaye de poser un peut partout ou je vais, même dans les catacombes c’était une super expérience. En te déplaçant il t’arrive parfois de faire de bonnes rencontres, des relations et puis ça te fait progresser, il faut toujours travailler pour monter de niveau. La somme de votre travail est impressionnante, combien de graffs pensez-vous avoir réalisé ? Alors là ! Je n’en sais rien, en fresques peut être deux cent et le reste.. Ben non ! Je ne sais pas. Mais là dedans je ne compte pas le travail sur toile ou autres supports. A plusieurs on a fait un gros, gros truc à Rouen, on a un autre projet de trente, quarante mètres de long. Il y a les jams, le skate-park. Il y a aussi la grosse fresque de Toulouse qui s’est retrouvée en double page dans un magasine spécialisé ce qui fait plaisir, et coïncidence sur la photo en dessus on pouvait voir le travail de mes potes d’Amiens. Le but du jeu est de kiffer ce que l'on fait et avec qui on est, le reste c'est que du bonus. Et le light painting ? Le light c’est tout nouveau et je suis en plein dedans, pour moi c’est le tout début. Je disais à ma copine il y a peu que j’avais l’impression de revenir dix ans en arrière et de découvrir le graffiti. L’art urbain est de plus en plus exposé en galerie et même dans des musées, que pensez-vous de cet engouement ? Être exposé est contesté par pas mal de gens, chacun fait ce qu’il veut, moi j'y trouve mon compte. Le graff est reconnu comme art et c’est un bien. J'apprends beaucoup, je rencontre les gens, obtiens des avis différents et partage mon travail avec les autres, le tout, en dehors de chez moi dans un lieu fréquenté par le public. Quand on voit des gars qui arrivent à vendre leur toile trente cinq mille euro, quelques fois beaucoup plus c’est bien pour lui, en tout cas il ne faut pas perdre de vue le délire du graff et tout ce que cela comporte si on ne veut pas perdre son identité et sa crédibilité. Le graff est un délit mais est exposé dans des musées nationaux, comment l’expliquez-vous ? C'est un tout. Il y a du graffiti dans la rue comme dans des galeries d’art, tant mieux, cette mouvance s'est développée et diversifiée grâce à ceux qui la pratiquent. Ils l’adaptent en fonction de leur envies et c'est ça qui fait qu'on peut le voir partout. Quand on sait que Laurence Parisot du Medef a acheté récemment une toile du graffeur Américain Quik pour l’accrocher dans son bureau, on peut se dire que les mentalités évoluent et que la toile est le meilleur moyen d’entrer chez les gens plus facilement. Le graff y perd un peu de son côté contestataire mais c’est toujours du graffiti. Que pensez-vous des autres formes de l’art urbain ? Il y a des similitudes, ça se rejoint et puis des affiches des graffeurs en font, du pochoir aussi. Comme le tag, le pocheur pose aussi partout et s’il pose à côté d’un graff, ça fait partie du paysage mais le pochoir est plus politique quand même car souvent accompagné de messages. Du pochoir je m’en suis servi un peu pour faire une petite signature logo, mais rien de plus pour l'instant. Ce sont plutôt les autorités qui entretiennent des rapports avec nous et des rapports sur nous. Le graffiti n’est pas le bienvenu au Havre. Bon ! Le centre ville, je comprends un peu mais dans ces conditions il est difficile de percer et de se faire voir alors il nous reste la banlieue. D’après vous, au Havre, il y a beaucoup de manieurs de bombes ? Pas beaucoup, en prenant une fourchette large entre trente et cinquante maxi, il y a des mecs qui bougent, qui arrivent et repartent. D’autres qui ne viennent que pour les gros trucs comme le Skate Park mais dans les actifs réguliers qui s’impliquent vraiment, allez disons vingt cinq à tout casser. J’ai vu à votre exposition au Music Bar que vous utilisez toutes sortes de supports pour vos créations, toile, carton, horloge et que sais je encore, qu’allez vous essayer maintenant ? Je vais surtout essayer de me creuser le cerveau pour trouver d’autres objets à graffer qui parlent au gens et qu’ils aient envie d'acquérir. Quelque chose de moins encombrant qu’un meuble décoré de graffs et que l’on peut poser sur une table ou une étagère, quelque chose que l’on peut acheter par coup de cœur. Cette exposition au Music bar se termine à la fin du mois, pour l’instant qu’en avez-vous retenu ? Très positif, tout d’abord j’ai pu exposer, chose que je ne croyais pas possible il y a peu, très positif aussi quand je vois le nombre de gens que j’apprécie qui sont venus, mes amis, des graffeurs bien sûr mais aussi ma famille, mes parents pas tellement pro graffitis, ont fait plus d’une heure de route et sont repartis en me disant, finalement « ce n’est pas mal ce que tu fais !», ce qui pour moi est une récompense énorme. Mes collègues de travail aussi sont venus voir mes toiles, depuis le temps que je leur casse les oreilles avec mes histoires de graffs ! Sans compter les rencontres et les commentaires des visiteurs et un peu de vente ce qui n’est pas négligeable. Si au Havre la municipalité était moins frileuse et acceptait l’idée d’un graff park, l’utiliseriez vous ? Carrément, je serais même le premier à filer un coup de mains pour mettre ça en œuvre, pour construire, mettre ma pierre à l’édifice. Moi tu me donne un endroit où travailler tranquillement, je ne m’en lasse pas. La politique du Havre c’est de supprimer les graffeurs mais ce n’est pas la bonne méthode et ils n’y arriveront pas, la solution est là, mettre des murs à disposition. Même s’il faut imposer des règles et réguler l’accès par l’inscription à un machin pour éviter le bordel j’en serais et je suis sur que ça peut marcher. Pour autant, il ne faut pas idéaliser, un graff park n'éradiquera jamais le graffiti vandal. Vous arrive-t-il de travailler sur commande ? Je fais de moins en moins de devantures mais surtout des toiles, j’en ai cinq ou six en cours en ce moment, des commandes à thèmes. Quatre-vingt quinze pour cent de Rap Américain et le reste un peu de tout. Maintenant quels sont vos projets, vos aspirations ? Progresser, taper plus de perso sur mes fresques, m’améliorer en toile et en technique, me diversifier dans les supports sans jamais oublier l’esprit Hip Hop : Peace Unity Love and Havin' Fun.
Dédicaces : Merlyn, Zone, Jiks, Louis VI dit le grooooos, Myck, Pares, Septik, Seter, Eruko, Termic, Resh, Iso, Myiet, Dyop, Dens, Nuans, Cajou, Rusk,Kifesa, Gemo, Akor, Amin, Test, Icole, Bside, Madkow. Les NEP's, ETA (la famille !), JOLIKERS, WTA, 309, GSM, T2M, Xcrew , B80, RTM, Candice, Saïve A.K.A Poulette, Ramon, Marie et les autres... Sevyse, merci de m’avoir reçu et de nous avoir fait partager votre passion pour cette activité si mal vue et pourtant reconnue depuis pas mal de temps maintenant par le monde de l’art. Propos recueillis par Mr Yak au Havre le 25/10/2009 Plus de photos dans la mini galerie de Sevyce.
|
Commentaires
Vous auriez pu lui demander en toute modestie où il se situe. La réponse est limite pitoyable. En gros celui qui a un niveau inférieur au tiens tu peux te permettre de le repasser et celui qui a un niveau supérieur, tu peux le courtiser (un peu comme quand Horphée est venu au Havre). C'est donc le niveau de quelqu'un qui fait la valeur sur le murs. J'aimerai bien savoir comment on fait pour juger le niveau de quelqu'un??? Si je trouve les productions de MONSIEUR cevis dégueulasses et qui n'a pas le niveau selon moi, je peux donc le repasser sans scrupule et ce sera donc légitime non? J'aimerai bien qu'il m'explique ces codes à lui. On ne peux pas les trouver sur INTERNET, parce qu’apparemment maintenant on met tout sur ce genre de média??? ça serait vraiment cool qu'il éclaire ma lanterne. j'ai hâte d'entendre sa grande philosophie sur le sujet.
Merci MR YAK !!!
Peut être à cette condition, cette technique et ses représentants entreront dans les musées.
C'est, comme on dit, tout le mal que je leur souhaite !:-):cry:
S’abonner au flux RSS pour les commentaires de cet article.